PROTOCOLE ADDITIONNEL AU TRAITÉ DE 1929.
Protocole additionnel au Traité du 21 janvier 1929 sur la délimitation de la frontière
entre la République Dominicaine et la République d’Haïti.
Signé à Port-au-Prince, le 9 mars 1936
Stenio Vincent,
président de la République d’Haïti
et Le généralissime docteur Rafaël Léonidas Trujillo Molina,
président de la République Dominicaine,
Vu que les cinq difficultés que par son Acte No 89 du 28 octobre 1930 laissa en suspens la Commission de délimitation organisée pour l’exécution du Traité des frontières dominicano-haïtiennes du 21 janvier 1929, ont été solutionnées par notre Accord du 27 février 1935 :
Vu qu’une solution pacifique a été donnée à l’exécution du Traité des frontières du 21 janvier 1929 par l’accord plus haut mentionné dont la réalisation a commencé le 2 juin 1935 sans qu’il fût nécessaire de recourir aux solutions indirectes prévues dans l’article 7 dudit traité :
Vu que l’exécution matérielle de la délimitation de la ligne frontière sur le terrain, telle qu’elle fut prévue par la Traité du 21 janvier 1929 est arrivée à sa fin, que les bornes indicatives ont été édifiées sur le terrain après accord et approbation des représentants des deux gouvernements;
Vu que les idées de paix absolue et les liens d’amitié inaltérable qui doivent régler les relations entre les deux peuples dominicain et haïtien exigent la révision de la ligne des frontières convenues en 1929 et ce, dans le secteur compris entre le point où la grande route qui conduit de Banica à Restauracion traverse la rivière Libon (Passe Maguanne, au point marqué 22 R. L.) et le point où ce même chemin traverse le fleuve Artibonite vis-à-vis de la ville dominicaine de Banica;
Vu que pour raffermir les liens d’amitié entre les deux pays, le Gouvernement de la République Dominicaine accepte la révision de ce secteur déjà tracé de la ligne des frontières et ce, sous la condition expresse que les commodités de passage données aux Dominicains par le Traité du 21 janvier 1929 dans ce secteur de la frontière ne soient pas diminuées, mais de préférence améliorées autant que possible :
Vu que le Gouvernement de la République Dominicaine animé du même esprit de conciliation dans les relations qui doivent exister entre les deux pays, consent à la révision de la délimitation prévue par le Traité du 21 janvier 1929 dans le secteur compris entre le fort Cachiman et la rivière Carrizal;
Vu que le Gouvernement de la République d’Haïti est de son côté disposé à accepter les révisions ci-dessus exprimées et cela pour contribuer au maintien et au raffermissement des liens d’amitié, avec tant de soins par nous cultivés, entre le peuple dominicain et le peuple haïtien;
Vu que la Commision de délimitation des frontières dans l’exécution de notre Accord du 27 février de l’année 1935 a fait les études et les avant-projets d’une route internationale à construire par les deux Etats et dont les frais seront supportés par parties égales par les deux pays, route qui assurera la commodité de transit tant pour les citoyens dominicains que pour les citoyens haïtiens, dans le secteur susmentionné;
Prenant en considération toutes ces circonstances et vu que l’accord déjà mentionné fut bien étudié dans les visites par nous échangées dans les années 1934 et 1935;
Nous, le président de la République d’Haïti et le président de la République Dominicaine avons traité et arrêté le protocole de révision qui suit :
Article 1er.
La République Dominicaine consent la révision du paragraphe 3 de l’article premier du Traité du 21 janvier 1929 en ce qui concerne les passages suivants :
« Suit ledit chemin (Camino Real) jusqu’au point où celui-ci croise le fleuve Artibonite, en face de Banica. »
« Le chemin dit “Camino Real” qui va de Banica à Restauracion s’entent de celui qui passe par la Miel, laissant ce bourg à l’Est, par la Guardia Vieja, par la Zurza, laissant à l’ouest la ville de Cerca la Source, par le cours d’eau Saltadero, par la Tuna et par El Botado, laissant ces deux sections à l’est; ladite ligne frontière suivant le chemin de Banica Restauracion sera tracée au milieu dudit « Camino Real »qui sera de cette façon, au service des deux Etats, et sera élargi pour répondre aux commodités du transit »; et accepte que dans cette section soient considérées comme limites des deux républiques, les suivantes :
Une ligne partant de Passe Maguanne soit du point marqué 22 R. L., suit l’axe de la rivière Libon jusqu’à la passe dénommée Tilori, de ce point la ligne suit l’axe d’une grande route, propriété des deux Etats, route commençant à la passe Tilori ou Madame Luchen, suit la rive droite de la rivière Libon, passe par Juan de Paz, de là franchit la rivière Los Algodones, coupe la rivière La Guarana, suit la rive droite de cette rivière, traverse la savane de la Mechora, passe par Cocol, suit le bas des coteaux de Las Guaranas, passe par Hatillo, la Tassajera, la Baria, la Diablesa, los Carraos jusqu’à El Corte (La Cour); À partir d’El Corte (La Cour, la route suivra le chemin existant actuellement sur une longueur de 1.500 mètres vers Guayacan. De ce point elle sera construite parallèlement au cours du fleuve Artibonite à une distance maximum variant entre 800 et 1.000 mètres; de là en passant à proximité du carrefour dénommé Croix Vieux Fond (Fondo Viejo) elle coupera la rivière La Salle, puis le cours d’eau dit Cañada Bonita; elle sera enfin poursuivie jusqu’à la passe dite « Cacaos ». Là elle franchira le fleuve Artibonite. A cet endroit sera construit le pont international de l’Artibonite.
A partir du pont international, la ligne frontière sera la ligne médiane du fleuve Artibonite jusqu’à atteindre la ville de Banica, continuant de là par le milieu de ce fleuve d’accord avec la délimitation établie en l’année 1929.
Article 2.
La grande route internationale dont l’axe servira de limite aux deux Etats entre la Passe Tilori, dans la rivière Libon, et la Pass de Los Cacaos dans le fleuve Artibonite et décrite dans l’article premier, a été tracée dans un croquis signé par la Commission de délimitation des frontières, en deux originaux et dont deux copies annexées au présent protocole et en formant partie sont également signées par la Commission de délimitation.
Article 3.
Cette grande route sera construite aux frais des deux Etats, c’est-à-dire chacun devra payer 50% de son coût total en matériaux, main d’œuvre, outillage, etc.
Les frais d’entretien et de maintien de la route seront supportés par les deux Etats contractants; chacun fera consigner dans son budget annuel le montant nécessaire à cette fin. Les moyens, les méthodes, etc., pour la réalisation dudit entretien seront l’objet d’un accord entre les Chancelleries des deux pays.
Article 4.
Les conditions techniques pour la construction de cette route sont les suivantes :
Route de macadam ou sablon de vingt centimètres d’épaisseur; Largeur ou amplitude (emprise) de sentier 60 mètres; Largeur ou amplitude de voie entre cunettes 7 mètres; Amplitude de macadam 5 mètres; Rayon de courbes minimum 28 mètres; Pente maximum 6%; Tangente entre courbes renversées (minimum) 15 mètres; Superélévation en courbes de rayon moindre de 250 mètres : 20 centimètres;
Ponts provisoires en bois d’une seule voie; Egoûts de tubes en fer galvanisé ou de maçonnerie et mortier armé. Les membres des deux sections de la Commission de délimitation pourront, durant la construction de la route internationale, faire varier la ligne actuelle lorsque les conditions du terrain et les nécessités de l’économie l’exigeront, conservant toujours le tracé dans le sentier 60 mètres de large, soit 30 mètres de l’un et de l’autre côté de la ligne d’axe du tracé actuel. Une fois la construction achevée, un plan détaillé sera dressé en double original, du tracé final, lequel sera signé par les deux Parties, et la ligne d’axe tracée et fixée par des bornes appropriées sera considérée comme la ligne des frontières dans ce secteu.
Article 5.
La République d’Haïti fait la déclaration et la République Dominicaine l’accepte que l’axe de la route internationale qui sera construite par les deux Etats est la limite définitive entre les deux républiques. Les deux gouvernements d’un commun accord édicteront des dispositions spéciales pour établir et réglementer les services de police et de douanes dans le trajet de ladite route et les autres chemins qui par leur nature et position peuvent intéresser les deux pays.
Article 6.
Les eaux des rivières Libon et Artibonite appartient en parties égales, aux deux Etats limitrophes et leur usage est soumis aux dispositions aux dispositions de l’article dixième du Traité de paix, d’amitié, et d’arbitrage qui fut par eux signé à la ville de Saint-Domingue aujourd’hui « Cuidad Trujilllo » capitale de la République Dominicaine, le 20 février de l’année 1929.
Les sentiers ou chemins vicinaux qui, existant actuellement, permettent l’accès des sources, des rivières et du fleuve Artibonite aux habitants et cultivateurs seront maintenus ou pourront être modifiés après accord entre les représentants des deux gouvernements.
Article 7.
Dans les quatre-vingt-dix jours qui suivront la ratification du présent protocole par les corps législatifs des deux Etats contractants, les deux gouvernements ouvriront les travaux de construction de la route internationale. Le montant des dépenses à faire, les spécifications de construction et de maintien seront examinées, rédigés et signés par les membres techniques de la Commission de délimitation et seront incorporés au présent protocole.
La route, y compris les ponts sur le Libon et l’Artibonite, devra être achevée dans un delai de deux ans, à partir de la date de l’ouverture des travaux de construction et chacun des deux Etats contractants fera figurer dans son budget annuel la quatrième partie du coût total de ces travaux.
Article 8.
Le République Dominicaine accepte la révision du paragraphe 3 de l’article premier du Traité du 21 janvier 1929 en ce qui se rapporte au passage suivant : a) « De là coupant par moitié le fort Cachiman et s’infléchit vers le Sud-Est en ligne droite jusqu’à trouver la rivière Carrizal » et accepte que dans cette section le tracé de la ligne frontière doit se déterminer comme suit : « de là, passant par le centre du fort Cachiman, s’infléchit vers le Sud-Est puis suit en ligne parralèle à quinze mètres de distance jusqu’à la rencontre de la rivière Carrizal, l’axe de la route qui va à Commendador laissant cette route en territoire haïtien ».
Article 9.
Le présent pacte, signé à Port-au-Princ, capitale de la République d’Haïti, sera soumis à la sanction des corps législatifs des deux pays et l’échange des ratifications aura lieu dans la Cuidad Trujillo, capitale de la République Dominicaine.
En foi de quoi, nous avons signé et scellé le présent protocole en deux exemplaires, l’un en espagnol et l’autre en français et les deux ayant force légale.
Port-au-Prince, capitale de la République d’Haïti, le neuvième jour du moi de mars de l’an mil neuf cent trente-six.
Signé: Sténio Vincent
Signé: Rafaël L. Trujillo