Le décret du 28 mai 1790 de l\"Assemblée générale de Saint-Domingue qui montre clairement la volonté des colons français, grands propriétaires de terres et d\"esclaves à Saint-Domingue, de proclamer l\"indépendance de la colonie, de maintenir l\"esclavage des noirs et les préjugés racistes envers les hommes de couleur:
"L’assemblée générale, considérant que les droits de la partie française de Saint-Domingue, pour avoir été longtemps méconnus et oubliés, n’en sont pas moins demeurés dans toute leur intégrité ;
Considérant que l’époque d’une régénération générale dans l’empire français, est la seule où l’on puisse déterminer, d’une manière juste et invariable, tous ses droits, dont les uns sont particuliers, et les autres relatifs ;
Considérant que le droit de statuer sur son régime intérieur appartient essentiellement et nécessairement à la partie française de Saint-Domingue, trop peu connue de la France, dont elle est séparée par un immense intervalle ;
Considérant que les représentans de Saint-Domingue ne peuvent renoncer à ce droit imprescriptible, sans manquer à leur devoir le plus sacré, qui est de procurer à leurs constituans des lois sages et bienfaisantes ;
Considérant que de telles lois ne peuvent être faites qu’au sein même de cette île, d’abord en raison de la différence du climat, du genre de population, des mœurs, des habitudes, et ensuite, parce que ceux-là seulement qui ont intérêt à la loi peuvent la délibérer et la consentir ;
Considérant que l’assemblée nationale ne pourrait décrèter les lois concernant le régime intérieur de Saint-Domingue, sans renverser les principes qu’elle a consacrés par ses premiers décrets, et notamment par la déclaration des droite de l’homme ;
Considérant que les décrets émanés de l’assemblée des représentans de Saint-Domingue ne peuvent être soumis à d’autre sanction qu’à celle du roi, parce qu’à lui seul appartient cette prérogative inhérente au trône, et que nul autre, suivant la constitution française, ne peut en être dépositaire ; que conséquemment, le droit de sanctionner ne peut être accordé au gouverneur général, étranger à cette contrée, et n’y exerçant qu’une autorité précaire et subordonnée ;
Considérant qu’en ce qui concerne les rapports commerciaux et les autres rapports communs entre Saint-Domingue et la France, le nouveau contrat doit être formé d’après les vœux, les besoins, el le consentement des deux parties contractantes ;
Considérant que tout décret qui aurait pu être rendu par l’assemblée nationale, et qui contrarierait les principes qui viennent d’être exposés, ne saurait lier Saint-Domingue, qui n’a point été consulté, et n’a point consenti à ces mêmes décrets ;
Considérant enfin que l’assemblée nationale, si constamment attachée aux principes de justice, et qui vient de manifester le dessein d’assurer la prospérité des îles françaises de l’Amérique, n’hésitera pas à reconnaître les droits de Saint-Domingue par un décret solennel et authentique ;
Après avoir délibéré dans ses séances des 22, 26, 27, et dans celle de ce jour, a décrété et décrète à l’unanimité ce qui suit :
Article 1er. Le pouvoir iégislatif, en ce qui coucerne le régime intérieur de Saint-Domingue, réside dans l’assemblée de ses représentans, constitués en assemblée générale de la partie française de Saint-Domingue.
2. Aucun acte du corps législatif, en ce qui concerne le régime intérieur, ne pourra être considéré comme loi définitive, s’il n’est fait par les représentans de la partie française de Saint-Domingue, librementet légalement élus, et s’il n’est sanctionné par le roi.
3. Tout acte législatif, fait par l’assemblée générale dans le cas de nécessité urgente, et en ce qui concerne le régime intérieur, sera considéré comme loi provisoire ; et dans ce cas, ce décret sera notifié au gouverneur général qui, dans les dix jours de la notification, le fera promulguer et tiendra la main à son exécution, ou remettra à l’assemblée générale ses observations sur le contenu audit décret.
4. L’urgence qui déterminera l’exécution provisoire, sera décidée parun décret séparé qui ne pourra être rendu qu’à la majorité des deux tiers des voix prises par l’appel nominal.
5. Si le gouverneur général remet des observations, elles seront aussitôt inscrites sur le registre de l’assemblée générale. Il sera alors procédé à la révision du décret d’après ces observations. Le décret et les observations seront livrés à la discussion dans trois différentes séances ; les voix seront données par oui ou par non, pour maintenir ou annuler le décret. Le procès-verbal de la délibération sera signé par tous les membres présens, et désignera la quantité de voix qui auront été pour l’une ou pour l’autre opinion. Si les deux tiers des voix maintiennent le décret, il sera promulgué par le gouverneur général, et exécuté sur-le-champ.
6. La loi devant être le résultat du consentement de tous ceux pour qui elle est faite, la partie française de Saint-Domingue proposera les plans concernant les rapports commerciaux et autres rapports communs ; et les décrets qui seront rendus à cet égard par l’assemblée nationale, ne seront exécutés dans la partie française de Saint-Domingue, que lorsqu’ils auront été consentis par l’assemblée générale de ses représentans.
7. Ne seront point compris dans la classe des rapports communs de Saint-Domingue avec la France, les objets de subsistance que la nécessité forcera d’introduire ; mais les décrets qui seront rendus à cet égard par l’assemblée générale, seront aussi soumis à la révision, si le gouverneur général présente des observations sur le contenu auxdits décrets, dans le délai fixé par l’article 3 ; et seront au surplus observées toutes les formalités prescrites par l’article 5.
8. Tout acte fait par l’assemblée générale et exécuté provisoirement dans le cas de nécessité urgente, n’en sera pas moins envoyé sur-le-cbamp à la sanction royale ; et si le roi refuse son consentement audit acte, l’exécution en sera suspendue aussitôt que ce refus sera légalement manifesté à l’assemblée générale.
9. Chaque législature de l’assemblée générale sera de deux ans, et le renouvellement des membres de chaque législature sera fait en totalité.
10. L’assemblée générale décrète que les articles ci-dessus, comme faisant partie de la constitution de la partie française de Saint-Domingue, seront incessamment envayés en France, pour être présentés à l’acceptation de l’assemblée nationale et du roi ; ils seront en outre envoyés à toutes les paroisses et districts de ta partie française de Saint-Domingue."
Pour études complémentaires, PROFILE AYITI vous recommande "Étude sur l\"histoire d\"Haïti, tome 1, Beaubrun Ardouin.