Le 22 septembre 1957, le docteur François Duvalier est élu président d'Haïti pour 6 ans, et peu de temps après, soit le 26 septembre, une loi martiale est décrétée sur tout le territoire national par un arrêté du Conseil Militaire de Gouvernement, présidé par le Général Antonio Th. Kébreau. Le couvre-feu en vigueur interdit de circuler sans autorisation.
En revanche, dans la nuit du 28 au 29 septembre, un malentendu conduit à la mort de 4 soldats haïtiens cantonnés à l’avant-poste de la commune de Kenscoff par des hommes qui demandaient une autorisation pour transporter une femme en mal d’enfant à l’hôpital. Un prisonnier qui a assisté au massacre, fait une description des assassins et est tout de suite mis sous protection.
Reproché d'avoir enfreint les règlements du couvre-feu, on arrête, à Pétion-Ville, le citoyen américain d'origine libanaise, Shibley Talamas. Ce dernier avait été roi du carnaval de Port-au-Prince en 1953, puis a joué comme acteur dans le film "The Golden Mistress" tourné en Haïti et sorti aux États-Unis en 1954.
Après avoir été interrogé par le lieutenant Octave Cayard, le citoyen Shibley Talamas est libéré. Cependant, le capitaine Pressoir Pierre demande que Talamas soit à nouveau arrêté. Les policiers des Recherches Criminelles se rendent chez lui, mais il n'y est pas. On perquisitionne son domicile: un fusil de calibre 12, une baïonnette, un pistolet de calibre 6,35 et des cartouches identiques à celles utilisées dans l’attentat de Kenscoff, y sont retrouvés et saisis.
Lorsque Talamas apprend qu’il est activement recherché par la police, il se réfugie chez le Consul américain. Celui-ci se rend au service des Recherches Criminelles pour défendre Talamas. Dans un tête-à-tête, le capitaine Pressoir Pierre exige au Consul américain que Talamas se présente au dit Service des Recherches Criminelles. Le Consul accepte de faire présenter Talamas, mais rappelle au capitaine Pressoir Pierre les mauvaises méthodes policières du pays.
Présenté à 3 h PM, Talamas est conduit aux Casernes Dessalines, puis est renvoyé au département de la police, enfin est conduit à Fort-Dimanche pour interrogatoire, suite aux ordres du général Antonio Kébreau. À 8 h 30 PM, le Sergent José des Recherches Criminelles appelle le capitaine Pressoir Pierre pour lui annoncer que Talamas se trouve dans état critique et qu'il est mourant. Le capitaine Pressoir Pierre demande que Talamas soit transporté au Pénitencier National, mais le capitaine André Fareau refuse d’accepter au Pénitencier un prisonnier sur le point de mourir.
Le citoyen Shibley Talamas est donc mort dans une camionnette qui le transportait à nouveau au département de la Police le 01 octobre 1957. C'est le début d'un ensemble de problèmes diplomatiques.
Le 4 octobre 1957, le Conseil Militaire du Gouvernement donne une Conférence de Presse aux Casernes Dessalines pour éclaircir les faits. Le capitaine André Fareau fait l’exposé de l’affaire qui oppose le Gouvernement haïtien à celui des État-Unis. Selon le Département d’État américain, Shibley Talamas est mort suite à de mauvais traitements et aux brutalités policières. En revanche, selon les autorités haïtiennes, Talamas est mort d’une défaillance cardiaque après son interrogatoire au département de la Police.
Pendant la Conférence de Presse, le Capitaine Fareau rappelle que Shibley Talamas était un agitateur qui avait été arrêté le samedi 25 mai 1957 dans les rues de Port-au-Prince pour avoir tiré sur une foule et avait en sa possession une carabine Autrichienne. Il était Déjoïste et faisait partie des jeunes qui se sont portés volontaires au camp d’Aviation. Le capitaine Fareau présente également aux journalistes le Moniteur où un arrêté d’expulsion avait été pris contre Talamas.
Cependant, pour faire baisser la tension diplomatique entre les deux pays, les officiers Pereira et Pierre Louis sont jugés par la Cour Martiale Générale, sont reconnus coupables de désobéissance aux ordres reçus de leurs supérieurs, sont condamnés à perdre dix points de leur classement, sont arrêtés avec perte d’appointement pendant dix jours, sont suspendus sans solde et sont mis en observation pour une durée de six mois, avec lettre de blâme.
En février 1958, le Gouvernement haïtien paie au Gouvernement américain, en faveur de la veuve Shibley Talamas et son enfant mineur, une indemnité de 100 000 dollars américains.
Pour études complémentaires, PROFILE AYITI vous recommande "Pour que vive la Mémoire, Jehan D. Colimon; Témoignages 1946-1976, L'espérance déçue, écrit par Capitaine Pressoir Pierre lui-même, publié en 1987; Moniteur No. 106 du samedi 28 septembre 1957 et le Blog de Profile Ayiti."
#Team_PROFILE_AYITI
#AYITI_SANS_MENSONGE.
M. Charles Philippe BERNOVILLE
Président et directeur des recherches.